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La gazette du Thriller

28 septembre,2024

Hannibal, la série NBC

septembre 01, 2022
Hannibal, la série NBC
V

ous connaissez bien maintenant notre amour inconditionnel pour le Silence des Agneaux et l’oeuvre originale de Thomas Harris. Nous aurions difficilement pu nous passer de regarder Hannibal, la série de NBC.

Hannibal, la série

Attention, il faut que nous commencions par préciser que nous avons pris beaucoup de retard dans le visionnage de cette série de 2013 dont la diffusion s’est achevée en 2015. Il faut avouer que nous étions plus que réticent à l’idée de cette adaptation que nous prédisions désastreuse de Dragon Rouge par Thomas Harris.

Car oui ! C’est bien de cela qu’il s’agit ! La série n’est pas une nouvelle version du Silence des Agneaux, mais bien du premier roman de la saga de Harris. La série se présente comme un préquel dudit bouquin, point sur lequel nous reviendrons un peu plus tard (spoiler alert : on est pas d’accord).

Le casting

Puisque l’action doit se passer avant Dragon Rouge (qui se passe avant le Silence des Agneaux, vous suivez ?), il est logique qu’elle suive les débuts de la relation entre Hannibal Lecter et Will Graham. Pour ceux qui ont la mémoire courte (ou pas vu Dragon Rouge, mais franchement...pourquoi ?), Will Graham est interprété dans le film par Edward Norton. Difficile donc de faire mieux pour son successeur.

Edward Norton en Will Graham dans Dragon Rouge

Bryan Fuller, créateur de la série, a choisi Hugh Dancy pour le remplacer. Dans le rôle de Jack Crawford, Laurence Fishburne (déjà vu dans Matrix notamment). Nous ne le plaçons pas dans la catégorie « personnages secondaires » car s’il y a bien quelque chose que l’on doit reconnaître, c’est que Fuller a redonné au personnage ses lettres de noblesse en le plaçant sur le devant de la scène.

Bien entendu, notre plus grande appréhension se portait sur le personnage de Hannibal Lecter lui-même. Qui pour remplacer notre idole Anthony Hopkins ?

Sans trop en dire à l’avance, le choix de Mads Mikkelsen ne nous a vraiment, vraiment, VRAIMENT pas déçu.

On retrouve également tous nos personnages secondaires préférés : le Dr Frederick Chilton sous les traits de Raul Esparza, excellent, Rinaldo Pazzi joué par Fortunato Cerlino, excellent, et Francis Dollarhyde, le Dragon Rouge, tout aussi excellent, joué par Richard Armitage.

le casting de la série hannibal

De nouveaux personnages récurrents font également leur apparition. On pense notamment au Dr Alana Bloom (Caroline Dhavernas), psychiatre du FBI. Pour ce qui est de Freddie Lounds (Lara Jean Chorostecki), le personnage était originellement masculin, portait d’ailleurs le nom de Freddy et était joué par Philip Seymour Hoffman.

On en garde quelques-uns sous le coude pour notre avis un peu plus bas.

Réalisation et esthétisme

C’est l’un des points les plus remarqués par la critique, et on ne peut qu’être d’accord – la série est une merveille visuelle !

Tout est soigné jusque dans le moindre détail. Les décors sont parfaitement réalistes, les jeux de lumière idéaux pour mettre en avant la beauté des scènes. Les scènes de crime en elles-mêmes sont travaillées avec grande précision et, aussi glauques soient les meurtres, on prend plaisir à les regarder.

3 saisons. 39 épisodes de 43 minutes. Vous pouvez la boucler en une semaine (si vous n’avez pas grand-chose à faire, comme nous).

Le soin du détail est aussi porté au nom des épisodes. Chacun des 39 épisodes porte le nom d’un plat. Français, japonais et italiens respectivement pour la première, deuxième et troisième saison.

Allez, on en a déjà trop dit… On passe à la critique !

Retomber amoureux du Dr Lecter

Que l’on préfère le Silence des Agneaux, Hannibal ou Dragon Rouge (impossible de préférer les Origines du Mal), avouez que c’est d’abord le charme du Dr Lecter qui nous séduit. Gros challenge pour ce nouveau psychiatre psychopathe… relevé avec brio ?

Mads Mikkelsen est Hannibal

Délicieux Mads Mikkelsen

Oui. Inutile de se voiler la face, le charme naturel de Mads Mikkelsen était l’ingrédient parfait pour créer un Hannibal Lecter aussi, si ce n’est plus, attirant que celui joué par Anthony Hopkins.

C’est un peu douloureux pour nous de le dire, et nous ne retirons rien à la performance de notre chouchou dans la saga cinématographique, mais Mikkelsen est un délice.

La réalisation encensée pour son esthétisme doit bien reconnaître que la beauté de la série est aussi celle de Mads Mikkelsen. Ne nous faites pas dire ce que l’on a pas dit. Nous ne sommes pas des midinettes amourachées. Il s’agit d’une beauté de jeu, de la subtilité d’un charme froid. Lecter est décrit dès l’œuvre de Harris comme un personnage doté d’une sensibilité artistique exacerbée, d’un goût pour la viande humaine, certes, mais aussi pour la beauté des choses.

Mads Mikkelsen

Les airs de musique classique entrent en résonance avec des scènes de cuisine récurrentes sans jamais lasser. On le sait, c’est le petit bout de cuisse de quelqu’un, mais on a quand même envie d’y goûter. Le soin porté à ses plats nous donne envie d’être invités à la table du Dr Lecter, qu’importe les conséquences.

Quand bien même la série aurait été une bouse, nous l’aurions regardée de bout en bout rien que pour sa performance.

Mikkelsen en Lecter, c’est Hopkins avec plus de raffinement.

L’univers Harris poussé à l’extrême

Visionnant les premiers épisodes d’un regard méfiant, nous nous sommes vite déridés à la vue de quelques belles surprises.

Ce qui nous a le plus touché, c’est que le personnage de Jack Crawford reçoive enfin le soin qu’il méritait et n’avait hélas pas reçu de la main de Jonathan Demme dans l’adaptation cinématographique. On découvre ici un personnage complet et complexe, sensible et fort à la fois. Ce qui n’apparaissait pas dans les films mais tenait une place importante dans les livres est enfin évoqué : sa femme est en train de mourir d’un cancer. Bien sûr, le format série permet d’exploiter l’intrigue originelle en profondeur, ce qui était moins facile sur grand écran, mais ce détail est crucial dans la description du personnage de Crawford. Laurence Fishburne est d’ailleurs excellent dans ce rôle.

Fuller va même plus loin ici que ne va Harris. Puisque la série se présente comme préquel à Dragon Rouge, il fallait bien trouver des intrigues propices à la rencontre de Graham et Lecter. Mission accomplie dès la saison 1. C’est presque une nouvelle histoire à chaque épisode qui nous permet d’apprécier ce rapprochement entre les deux personnages principaux. Et quelles histoires !

Sans aller trop loin dans la description de la saison 1 pour ne pas vous divulgâcher les meilleurs moments, nous tenons à revenir sur l’esthétisme des modi operandi. Les ambiances créées sont un régal pour les yeux. Une femme empalée sur des bois de cerf ? Une merveille. Un corps en décomposition devenu champignonnière ? On en saliverait presque !

En plus de créer un nouvel univers graphique sur celui de Harris, Fuller parvient à nous surprendre. Et surprendre au sens premier du terme ! On reproche souvent aux séries ou films supposés à suspense d’être trop prévisibles dans leurs « coups de théâtre », mais le moins qu’on puisse dire (surtout sur les premiers épisodes) d’Hannibal, c’est que l’on ne s’attend jamais à ce qu’il va se passer juste après !

C’est bien simple, nous ne pensions qu’à une chose toute la journée : rentrer regarder le prochain épisode !

Hugh Dancy en Will Graham dans Hannibal

Petit bémol toutefois… Réécrire, réinterpréter, développer – tout cela est admis et nécessaire. Dénaturer l’est moins. Nous avons un sentiment très partagé concernant Will Graham. Nous avons quelques doutes sur le jeu de Hugh Dancy, pas très naturel selon nous, mais il est surtout desservi par une écriture du personnage abracadabrantesque. Sa façon d’analyser les scènes de crime nous a dérangé. Utiliser le spectre autistique (puisque c’est bien de cela qu’il s’agit) pour justifier une sorte de pouvoir super-héroïque… Très indélicat selon nous.

Dragon Rouge ou Carton Rouge ?

Pourquoi un tel titre alors que nous avons encensé la série dans tous les précédents paragraphes ?, vous demandez-vous.

Pourquoi ce n’est PAS un préquel

La série toute entière devait être un préquel à Dragon Rouge. C’est en fait un melting pot de Dragon Rouge, Hannibal et le Silence des Agneaux. A la limite, pourquoi pas ! 3 saisons, 3 histoires replacées dans l’ordre chronologique… Nous n’aurions pas été contre. Mais là, on est à deux doigts du manque de respect pour Thomas Harris.

Saviez-vous, d’ailleurs, que l’écrivain est un peu tatillon lorsqu’il s’agit d’adapter ses livres ? Une première adaptation de Dragon Rouge en 1986 l’avait déçu au point qu’il ne veuille pas, à l’époque, voir le Silence des Agneaux. Dieu merci, il était tombé un peu plus tard sur une diffusion à la télévision et l’avait déclaré « excellent ». Ouf.

Que penserait-il de ces scènes recoupées de manière complètement aléatoires, de ces personnages traités comme s’ils étaient interchangeables ?

Si vous connaissez bien son œuvre, vous repérerez rapidement les erreurs intentionnelles des créateurs de la série… Le personnage de Miriam Lass, petite protégée de Crawford, ressemble à s’y méprendre à Clarice Starling. Sauf que Clarice n’aurait absolument rien à faire dans les événements antérieurs à Dragon Rouge.

Des péripéties Hannibalesques sont introduites de gré ou de force dans le personnage de Graham, des échanges Hannibal-Clarice deviennent des dialogues Gideon-Bloom…

Abel Gideon Hannibal

On apprécie par ailleurs beaucoup ces deux personnages ! Abel Gideon est une belle valeur ajoutée et la performance d’Eddie Izzard est magistrale de bout en bout. Quant à Alana Bloom incarnée par Caroline Dhavernas, elle apporte une douceur agréable à cet univers dérangeant (du moins au départ). Fallait-il pour autant créer ce patchwork de scènes et de dialogues volés ?

Nos exigences sont peut-être proche de la manie quand il s’agit du monde d’Hannibal, mais il faut au moins reconnaître que l’utilisation d’éléments supposés se dérouler après Dragon Rouge n’ont rien à faire dans un préquel…

Saison trois, saison de trop

Nous avons supporté les écarts scénaristiques sur les deux premières saisons, mais la saison trois a pour nous été un coup de massue.

Trop de métaphore tue la métaphore

On appréciait l’esthétique de la série, le visuel soigné et les dialogues délicats. Sans doute les créateurs l’ont-ils senti, et pour sauver leur série, ont poussé les curseurs au maximum sur la saison 3.

Résultat ici : du grand n’importe quoi. En début de saison, notamment, l’omniprésence d’interludes visuelles et de volutes de fumées sont autant de ficelles grotesques que le réalisateur n’a pas su cacher. Pas mieux pour l’écriture, et ce déjà en fin de saison 2. Certains critiques l’ont d’ailleurs relevé, les dialogues n’ont même plus de sens ! En poétisant et métaphorisant à outrance, les échanges ont perdu tout réalisme. On tombe de haut.

Ils ont sali Hannibal

Mais la pire des offenses, c’est le sort réservé à Hannibal. Pas le personnage, non. Le Hannibal, suite du Silence des Agneaux. Le Hannibal où un Dr Lecter libre comme l’air affole les rues de Florence. Le HannibalRinaldo Pazzi se pense plus intelligent que le Dr Lecter.

Le deuxième volet de la trilogie cinématographique est un bijou. Il est réduit ici à une intrigue secondaire, un détail qui ne servirait qu’à amener l’histoire du Dragon Rouge. Ne pas réserver à cette partie de l’histoire la place qu’elle mérite est à la frontière du blasphème, et la Gazette ne peut le pardonner.

Bon, on exagère peut-être un peu. Il y a malgré tout de très belles scènes dans la saison 3, que nous vous laissons découvrir. Mais elles ne rattrapent pas les libertés qui n’auraient jamais dû être prises à la base...

Grosse surprise toutefois : la fin, c’est assez rare pour le souligner, est une réussite.

ATTENTION, GROS SPOILER A VENIR

Et maintenant… quoi ?

La fin est vraiment réussie. L’admiration quasi-religieuse de Will pour Hannibal, dont on ignore si elle se terminera par un sacrifice ou une crucifixion, nous tient en haleine. Jusqu’aux tous derniers instants, dans leur étreinte gisante, on ignore si l’amour a pris le pas sur la haine, ou si les deux se mélangent à parts égales. La scène finale de boucherie du Dragon Rouge en symbiose meurtrière est incroyable et nous rappelle le début de la série dans ce qu’elle avait d’esthétique et de surprenant. Une vraie belle surprise. Nous nous attendions presque à un baiser (et Fuller aurait d’ailleurs lui-même avoué regretter de ne pas l’avoir écrit).

Et attention, ce n’est pas fini ! Il faut attendre la fin du générique pour voir le meilleur. Ces sentiments partagés provoqués par Hannibal chez le spectateur, puis chez Graham, et qui ont coupé les jambes (littéralement) de Gideon ont toujours été plus encore évidents chez Bedelia du Maurier, incarnée avec brio par Gillian Anderson. La vraie scène finale, attablée prête à déguster sa propre jambe, est une promesse qui nous met l’eau à la bouche. La dernière page n’est peut-être pas tournée.

Que s’est-il passé en 2015 ?

La fin ouverte laissait sous-entendre une saison 4. Hélas, la chaîne NBC avait mis fin à la série pour des raisons d’audience. C’est Netflix qui avait remis la série au petit écran, et c’est Netflix qui pourrait nous offrir la suite tant attendue !

Il y a quelques années, c’est Mikkelsen lui-même qui laissait planer un doute en interview. Fuller se serait, selon lui, intéressé aux droits sur le Silence des Agneaux. Même si les instants volés nous laissent perplexes sur la possibilité d’une nouvelle saison mettant en scène Clarice Starling, nous ne pouvons cacher notre excitation et nos fous espoirs…

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